Rédigé par Gabriel Larivière et révisé par Joëlle Beauséjour. Monsieur Larivière a dirigé pendant plus de 20 ans un organisme d’intervention en stress post-traumatique auprès des personnes victimes d’actes criminels.
1— Est-ce que le post-trauma est « curable »?
Oui… et non. En fait, l’événement traumatique fera toujours partie du passé de la personne, il en va aussi ainsi pour les conséquences. Cependant, celles-ci pourront diminuer ou même parfois disparaître, avec le temps et les suivis appropriés.
Certaines conséquences demeureront présentes, mais de façon aléatoire et à intensité variable. Dans ces cas, parfois la personne développera des stratégies afin de pallier l’apparition de celles-ci.
D’autres par contre, seront permanentes. Bien que l’intensité pourra parfois diminuer avec le temps, leur présence demeure constante et marquera la vie de la personne à jamais.
2- Est-ce que toute personne est susceptible de vivre un choc post-trauma et développer un stress post-traumatique?
En fait oui, tous peuvent vivre un choc post-trauma. Il n’y a pas nécessairement de prédisposition, même si le vécu de la personne pourra influer sur la probabilité d’en vivre un. Le choc post-trauma le dit, c’est un choc vécu par une personne lors d’un événement traumatisant. Donc si l’événement est traumatisant, il provoquera un choc.
Bien que cela semble simpliste comme explication, cela demeure la nature même de la bête. Par contre, le vécu de la personne, ses traits de personnalité, la présence de problématique en santé mentale… influenceront la probabilité que la personne vive le choc et auront surtout une influence sur l’intensité du choc.
Ceci étant dit, toute personne qui vit un choc post-trauma ne développera pas nécessairement un syndrome (état) de stress post-traumatique (ESPT). La nuance entre les deux est la persistance des symptômes. On dit habituellement que si les réactions primaires (le choc) persistent et dépassent un mois, on parle alors de ESPT.
Encore là, l’intensité, le niveau d’incapacité vécu par la personne, la durée du processus de rétablissement… varieront d’une personne à l’autre en fonction d’une multitude de facteurs.
3— En quoi l’état initial de la personne influencera-t-il le développement de l’ESPT?
Grandement. Comme personne n’est une page blanche, tout notre vécu influence ce que nous vivons et comment nous le vivons, et ce, bien sûr, à des niveaux d’intensité différents. Il en sera donc de même lors d’un événement traumatisant et du choc qui s’en suivra.
Nous l’avons vu plus tôt, il y a une différence entre le choc et l’état de stress post-traumatique. Et nous avons aussi vu que le vécu de la personne, l’état préalable de la personne aura aussi son influence.
Outre ces facteurs, la nature de l’événement aura bien sûr une grande influence sur l’intensité des réactions. La durée de l’événement jouera aussi un rôle. Les conséquences qui s’en suivront; physiques, psychologiques, émotives, matérielles, familiales, sociales, monétaires, existentielles. Les personnes impliquées auront aussi leurs impacts. Que ce soit un proche qui le subit ou qui le cause.
4— En quoi la nature de l’événement influence-t-elle la réaction?
L’influence est considérable et surtout variable d’une situation à une autre, d’une personne à une autre. Il est donc ici difficile de tout définir. Mais allons-y de quelques concepts.
La nature de l’événement est importante. Était-ce prévisible ou non? Était-ce probable que cela survienne? À moi? Ici? En ce temps? Est-ce un événement naturel (tornade, ouragan…), accidentel (auto, incendie…), de santé (cancer, chronique, blessure…), ou causé de main d’homme? Si oui, involontaire (négligence, accident industriel…) ou volontaire (agression, guerre, génocide…).
Cela nous donne donc une bonne idée des nombreux facteurs qui pourront influencer la nature/intensité du choc post-trauma et la possibilité d’en développer un ESPT.
Tous avons un schéma, une liste mentale, des probabilités, des « possibles » qui pourraient survenir dans notre vie. Cela sera grandement influencé par notre personnalité, notre éducation, notre niveau social, notre style de vie, du pays où nous vivons…
Notre réaction aux événements sera aussi proportionnelle à la possibilité de leur survenance. Un léger tremblement de terre ici devient un événement. Le même, au Japon ou en Californie, passera inaperçu compte tenu du très grand nombre de tremblements de terre qu’ils ont annuellement. Il en sera de même pour des tempêtes ou autres phénomènes naturels. On parlera souvent de « act of God ». Cela survient au hasard. Je n’y peux rien. Et je ne suis pas visé directement.
Bien que personne ne le souhaite, nous avons tous une certaine crainte qu’un accident survienne et y accordons un certain pourcentage de probabilités de sa survenance. Je tenterai de minimiser les risques, mais je sais que je ne peux tout contrôler et que cela demeure possible. Par contre, malgré cette possibilité, le choc sera toujours présent, car il y a aussi une part de déni de la réalité où souvent je crois à la survenance des choses, mais pas à moi ou pas maintenant. La gravité des conséquences jouera aussi un très grand rôle dans l’intensité du choc.
S’il s’agit d’un événement encore plus hors du commun, l’élément-surprise sera plus grand et souvent l’intensité initiale du choc sera proportionnelle.
SI l’événement est dirigé directement vers moi, ou du moins que je le crois (agression, vol…), l’intensité sera bien sûr d’autant plus grande, car je me sens directement attaqué. On en a voulu à ma personne. Si en plus, l’agresseur est connu, ce qui est habituellement le cas, mon choc en sera encore plus grand. Il y aura ici souvent une question de confiance, trahison, incompréhension. Comment quelqu’un que je connais, qui me connaît, a-t-il pu m’agresser?
En tout temps, la nature des blessures, conséquences, pertes, influenceront l’intensité du trauma. La persistance ou la permanence des conséquences auront aussi leur rôle à jouer.
Choc post-trauma versus syndrome (état) post-traumatique (ESPT)
Souvenons-nous encore ici que le choc post-trauma est une chose et que l’ESPT en est une autre. Bien qu’ils soient souvent liés, il n’y a pas toujours de lien direct ou de causalité entre les deux. Dans certains cas, le choc sera très intense, mais sans qu’un ESPT ne se développe. Dans d’autres cas, ce sera l’inverse, le choc initial semble bénin, même parfois absent, et pourtant un ESPT se développera.
Enfin, l’aide, le support, les soins reçus après les événements influenceront bien sûr le rétablissement.
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